« La musique et la poésie ont eu plus d'influence sur moi que sur la peinture. Surtout la musique de Webern. Je voulais faire en gravant ce qu'il avait fait en musique: élaborer un rythme visuel avec des rythmes antagonistes créés par l'effet frappant de la couleur. » Yves Gaucher

Initialement connu comme graveur, Yves Gaucher connaît un succès précoce. Il fréquente l'École des Beaux-arts à Montréal de 1954 à 1956, et un an plus tard il revient pour étudier la gravure sous Albert Dumouchel. Graveur accomplit, Gaucher participe et remporte de nombreux prix lors d'expositions internationales d'art imprimé, avant même qu'il ne soit acclamé comme un peintre abstrait au talent unique. En 1957, Gaucher propose sa première exposition personnelle à la Galerie l'Échange, à Montréal. En 1960, il fonde l'Association des Peintures-Gravures de Montréal.

 

Au début des années 1960, Yves Gaucher délaisse la gravure et découvre les peintres modernes tels que Barnett Newman et Mark Rothko. Il est possible de distinguer deux événements particuliers ayant marqué la carrière artistique de Gaucher et qui le modèleront en peintre de Plasticien de renom, tel qu'il est connu aujourd'hui. Lors de sa visite à l'exposition rétrospective de Mark Rothko au Musée d'Art Moderne de New York (M.O.M.A.), Gaucher a été profondément ému par ce qu'il a pu y voir. C'est pendant cette période, qui comprenait un voyage à Paris en 1962, que Gaucher réalise qu'il se définit davantage comme un francophone nord-américain qu'un Français, et que son travail ressemblait plus à l'art contemporain new-yorkais qu'à de l'art européen. C'est à ce moment qu'il commence à n'utiliser qu'une simple ligne droite dans ses oeuvres et qu'il s'intéresse à la géométrie; il utilise ce qu'il désigne comme des « signaux », soit des lignes horizontales, des carrés et des coupures à même la toile tracées dans l'intention de faire passer l'œil d'un point à l'autre et de créer un expérience unique pour l'observateur. La critique Françoise de Repentigny a décrit de façon astucieuse comment Gaucher « communique avec un art transcendantal, résultant d'un processus ascétique». (The Plasticiens and Beyond, p. 87)

 

En 1962, Gaucher est fasciné par la musique d'Anton Webern, pour tenter d'influencer son travail et pour rendre hommage à l'artiste, il  crée une pièce En Hommage à Webern no. 2. Gaucher crée sa première oeuvre d'importance à la suite de cette poussée d'inspiration, Danses carrées, 1964. La même année, l'artiste épouse Germaine Chaussé. C'est aussi en 1964 et 1965 que Gaucher consacre son temps exclusivement à la peinture.

 

Gaucher commence à travailler sur sa série de peintures Gris sur Gris, en décembre 1967. Reconnu comme son travail le plus fin, les oeuvres de cette série évoquent le calme et le recueillement et, comme l'explique James Campbell, ses toiles « exigent de regarder » (Campbell, p. 57). La série de tableaux Gris sur Gris exigent de s'attarder et d'examiner attentivement, et avec une grande force de concentration, ce qui permet à chaque composition de vivre et de révéler ses secrets à l'observateur. En effet, il a décrit lui-même les toiles de la série Gris sur Gris comme des non-entitées, ou des non-objets, et soutenait que les détails perçus étaient issus de l'analyse qui en était faite. Sur une période de deux ans, soit jusqu'en 1969, il exécute plus de 60 tableaux pour cette série.

 

Ensuite, Gaucher s'intéresse et explore les relations mathématiques et spatiales, et, en 1970, il peint de larges rayures horizontales en couleurs vives, également appelées peinture par bande de couleurs (Terme anglais: colour band painting). Suivront ainsi la période des peintures sombres (Dark Paintings) dans les années 1980 et celle des peintures pâles (Pale Paintings) un peu après, dans laquelle Gaucher a connu un renouvellement dans son travail.

 

Dans les années 1960, le travail original de Gaucher et de ses collègues de Plasticiens, dont Guido Molinari et Claude Tousignant, ainsi que ses peintres « post-plasticiens » comme Charles Gagnon et Jean McEwen, dans l'opinion de plusieurs experts à tout le moins, sont des artistes d'avant-gardes de grande qualité, au même titre que les artistes de New York ou de Paris.

 

Gaucher a également enseigné à l'Université Concordia à la fin de sa carrière artistique et a été nommé à l'Ordre du Canada.

 

Copyright Galerie Alan Klinkhoff, 2014.

 

 

Références:

James D. Campbell, The Asymmetric Vision: Philosophical Intuition and Original Experience in the Art of Yves Gaucher, Mackenzie Art Gallery: Regina, 1989.

Roald Nasgaard and Michel Martin, The Plasticiens and Beyond: Montreal, 1955-1970, Varley

Art Gallery of Markham et Musée National des Beaux-arts du Québec.

Musée des Beaux-arts du Canada, Yves Gaucher,  En ligne: http://www.gallery.ca/en/see/

collections/artist.php?iartistid=1967

The Canadian Encyclopedia, Yves Gaucher, En ligne: http://www.thecanadianencyclopedia.ca/en/article/yves-gaucher/

Roald Nasgaard, Abstract Painting in Canada, Douglas & McIntyre: Art Gallery of Nova Scotia, 2007.

 

 

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